FOCUS FAKE CHEICKING
Dans la dynamique de refondation du Mali, les autorités de la Transition ont entamé les reformes politiques et institutionnelles. Ainsi, elles ont engagé la rédaction d’une Nouvelle Constitution dont le contenu de l’avant-projet a fait l’objet d’interprétations relayées sur les réseaux. Il s’agit de la notion de LAÏCITÉ, inscrite au Préambule de l’avant-projet de la nouvelle Constitution.
La sensibilité de la notion de laïcité, à la fois dans les considérations politiques qui tentent de l’expliquer selon leur idéologie et religieuses qui sollicitent sa suppression de la Loi fondamentale, impose à la COCEM à travers cette newsletter qui se veut aussi un outil de monitoring des réformes politiques et institutionnelles de mettre à votre disposition des informations officielles.
A titre d’exemples, dans la parution du numéro 407 du 26 janvier au 1er février 2023 du Journal Du Mali, nous pouvons lire :
« Au nom de la laïcité́, au Mali on réfute les enseignements du Coran », lâche le religieux en plein sermon du vendredi. « Dans ce pays, on se dit tous Musulmans, à commencer par les plus hautes autorités du pays, mais nous refusons de le montrer aux yeux du monde. Par exemple, pour- quoi, avant de commencer leurs discours, elles [les autorités] ne commencent pas par invoquer Allah et le Prophète Mohamed (PSL) ? Tout cela à cause de cette soi-disant laïcité́ importée des pays non Musulmans. Il faut que ça change », s’exaspère-t-il.
« Le 7 janvier, une dizaine de personnes se regroupait à l’invitation du Collectif des associations musulmanes du Mali, à la Maison de la presse, pour débattre d’une laïcité́ « négative, sectaire, agressive et intolérante », qui, selon elles, marginalise et exclut délibérément la communauté́ musulmane de presque toutes les instances de décision du pays. « La laïcité́ est un système qui exclut les églises de tout pouvoir politique, administratif, spécifiquement de l’organisation de l’enseignement. Dans notre cas, il faut remplacer église par la religion. Étant définie comme cela, qu’est-ce qui reste à la religion dans la gestion de l’État ? », s’interrogeait Mohamed Kimbiri. Déterminé́, le Président du mouvement haranguait la foule : « tout ce qui se fait sans toi se fait contre toi. Nous n’allons plus quitter la scène politique soi-disant que ça ne nous concerne pas. Et, pendant ce temps, au moment des élections, nous devenons des bêtes électorales dont on sollicite les votes et après on les exclut de la vie politique ». L’assistance approuve. Le religieux enchaine : « on constate que depuis l’indépendance tous ceux qui ont essayé́ de réviser la Constitution ne se réfèrent pas à nos réalités, telles que définies dans la Charte de Kurukanfuga, mais font plutôt un copier-coller de la Constitution française. Alors que nos réalités diffèrent […] »
Qu’en est-il réellement à propos de ce sujet qui ne cesse de susciter des débats ? Que dit l’avant-projet de la Nouvelle Constitution par rapport à la notion de laïcité ?
Nous vous proposons l’article qui consacre cette disposition dans ledit document.
PRÉAMBULE
Le Peuple souverain du Mali,
Riche de sa diversité́ culturelle, linguistique et religieuse ;
Fier de son histoire millénaire et de ses ancêtres ;
Héritier de grands empires et royaumes bâtis sur des valeurs socioculturelles endogènes devant inspirer les générations présentes et futures ;
Fidèle aux idéaux des martyrs du colonialisme, des pères de l’indépendance et de tous ceux qui sont tombes au champ d’honneur pour la défense de la patrie, l’avènement d’un État de droit, de démocratie pluraliste et pour une bonne gouvernance ;
Considérant la crise multidimensionnelle récurrente qui affecte l’État et la société ;
Considérant que la corruption et l’enrichissement illicite compromettent les efforts de développement du pays ;
Convaincu de la nécessité de promouvoir le vivre-ensemble et la réconciliation nationale dans le respect des identités et de la diversité culturelle ;
Soucieux de garantir la défense et la sécurité indispensables à l’existence d’un État souverain ;
Résolu à valoriser le patrimoine culturel, matériel et immatériel et à préserver les ressources naturelles du territoire pour les générations présentes et futures ;
Décidé à promouvoir le bien-être social ;
Affirme sa volonté de renforcer les acquis démocratiques de la révolution du 26 mars 1991 et de promouvoir les idéaux de la refondation portés par les acteurs du changement ;
S’engage à défendre la souveraineté, l’unité nationale et l’intégrité du territoire ; Réaffirme son attachement à la forme républicaine et à la laïcité de l’État ;
S’engage à entreprendre toutes actions nécessaires pour lutter contre la corruption et l’enrichissement illicite et promouvoir une gouvernance exemplaire de l’État ;
S’engage à assurer l’amélioration de la qualité de la vie et la protection de l’environnement ;
Souscrit à la Déclaration universelle des droits de l’Homme du 10 décembre 1948 et à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples du 27 juin 1981 ;
S’engage à garantir le respect des droits humains, en particulier ceux de la femme et de l’enfant, consacrés par les traités et accords sous-régionaux, régionaux et internationaux signés et ratifiés par le Mali ;
Réaffirme son attachement à la réalisation de l’Unité Africaine, à la promotion de la paix, de la coopération sous-régionale, régionale et internationale, au règlement pacifique des différends entre États dans le respect de la justice, de l’égalité, de la liberté et de la souveraineté des peuples;
Adopte la présente Constitution dont le préambule fait partie intégrante :
Nous pouvons constater que :
La LAÏCITÉ est consacrée au niveau de l’alinéa 14 du Préambule: “… Réaffirme son attachement à la forme républicaine et à la laïcité de l’État…”
et de l’Article 32:_ “La laïcité a pour objectif de promouvoir et conforter le vivre-ensemble dans la société, fondé sur la tolérance, le dialogue et la compréhension mutuelle.”_ de l’avant-projet de Constitution.